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COVID 19 - Arrêtés Royaux pour la réquisition des professionnels de santé et la délégation de soins infirmiers

09/05

Deux Arrêtés Royaux, concernant la réquisition des professionnels de santé et la délégation de soins infirmiers à d’autres professionnels de santé n’appartenant pas à l’art infirmier, ont été publiés et ont déjà été largement relayés et commentés.

 

Concernant le processus de rédaction de ces AR : L’acn n’a jamais été consultée dans la rédaction de ces AR. Nous déplorons ce manque de consultation de la profession par les instances politiques. Rédiger un texte sans solliciter l’avis des personnes principalement concernées nous semble à la fois peu efficace et peu respectueux, nous ne validons pas cette manière de procéder. Il est grand temps qu’il devienne un réflexe d’entendre systématiquement les praticiens de l’art infirmier sur les questions qui les concernent ou qui impactent leur travail !

 

Concernant le contenu de ces AR : Ces AR doivent être « activés » lors d’une crise pour pouvoir être mis en œuvre. L’acn aurait préféré que la profession soit consultée pour discuter des modalités et des balises ou limites à mettre pour éviter toute dérive. Mais un système de santé moderne qui ne prévoit pas un éventuel dépassement de ses capacités en ressources humaines ordinaires en cas de crise sanitaire majeure serait un mauvais gestionnaire. Pour davantage d’informations sur le contenu des AR, voyez ci-dessous et n’hésitez pas à nous consulter si un point reste peu clair.

 

Concernant la pénurie d’infirmiers qui a rendu ces AR nécessaires : Cela fait longtemps que l’acn et les autres associations professionnelles se battent pour valoriser la profession, mais elles ne sont pas toujours entendues… et les mesures prises depuis quelques années par M. De Block ont même empiré la situation, nous les avons toujours systématiquement dénoncées. Il est grand temps que des mesures structurelles soient prises pour soutenir les infirmiers, les aides-soignants, les étudiants. Nos revendications de l’acn figurent dans un mémorandum, envoyé aux partis politiques durant la période des élections, nous espérons les voir concrétisées après la crise dès la formation d’un nouveau gouvernement. Elles peuvent toujours être consultées sur notre site : https://www.infirmieres.be/actualites/infirmiers-et-aides-soignants-apres-laction-et-la-colere-le-deuil-et-les-propositions

 

Durant cette crise, les membres de la profession, infirmiers et aides-soignants, se sont montrés exemplaires dans leur mobilisation et leur souci qu’aucun patient ne soit laissé sans soins de qualité : nous les félicitons et les remercions !

 

Vous trouverez également  le Communiqué de Presse envoyé le 07 mai par l’UGIB sur ce même sujet en cliquant ici

 

Nous espérons que ces informations vous ont été utiles, et restons disponibles pour vous. 

L’acn vous soutient ! Tenez bon.

 

 

Contenu des AR réquisition et exercice de l’art infirmier par d’autres professionnels de la santé

En fait, la Loi coordonnée relative à l'exercice des professions des soins de santé comprend déjà un article n°148 issu de l’AR n°78, donc de 1967, prévoyant la délégation d’actes infirmiers à des non-infirmiers, n’importe qui, mais uniquement en cas de guerre ou de calamité. Il n’y a donc rien de nouveau mais il était nécessaire (en considérant la situation catastrophique en Chine et en Italie) de se préparer à une situation potentiellement identique et de rafraîchir cet article 148 – par exemple de remplacer le « n’importe qui » par « autre professionnel de santé ».

Une autre législation (Article 181 de la loi du 15 mai 2007 relative à la sécurité civile), sur les pouvoirs du Gouverneur, permet déjà la réquisition du personnel (de santé ou pas) de n’importe quelle entreprise pour sauvegarder la sécurité ou la santé publique, mais cette législation ne permettait pas la réquisition d’un travailleur d’une entreprise non-réquisitionnée pour le mettre en service dans une institution de santé. Ce nouveau texte ne concerne donc pas une nouvelle disposition pour le personnel de santé déjà sous contrat dans les institutions de soins (pour eux il y a déjà d’autres dispositions), mais bien pour ceux qui travailleraient ailleurs.

Il s’agit bien sûr ici d’une ouverture de nouvelles possibilités, très hypothétiques, au cas où rien d’autre n’est possible, afin (1) d’aller chercher des professionnels de santé ayant un visa mais n’exerçant plus dans le système de santé (par exemple des enseignants infirmiers, médecins de mutuelle, kinés gérant un centre de fitness, etc.), et (2) de pouvoir déléguer des tâches infirmières à des autres professionnels de santé qui aujourd'hui ne peuvent rien faire dans le domaine infirmier (par exemple un kiné ne peut pas légalement/en dehors de cette nouvelle disposition "calamité" donner à manger à un patient, lui donner une pilule, faire sa glycémie...). Jusqu’à présent, même au pire de la crise, les réquisitions externes ont déjà été évitées (grâce à des heures supplémentaires, du volontariat, l’appel à l’armée, etc.), donc il faut s’imaginer que c’est vraiment dans un état de totale déroute du système que ces AR seraient activés. Nous voudrions souligner que le fait que de nombreux infirmiers et aides-soignants se soient portés volontaires a notamment permis d’éviter ces réquisitions, merci à tous les membres de cette formidable profession !

Est-ce que les infirmiers délégueront des tâches à des non-infirmiers ? Seuls des médecins ou des infirmiers le décideront d’après ce nouvel AR, si l’AR est activé, et déléguer ne sera jamais obligatoire. Est-il normal que notre système soit autant en danger de manque de personnel de santé en période de crise ? NON. Si la profession était mieux soutenue et valorisée, les infirmiers seraient en plus grand nombre sur le terrain. Mais même si la situation de danger est exceptionnelle, et que la pénurie est anormale, faut-il ne rien anticiper au cas où ? Non plus.

Ces AR arrivent un peu tard par rapport à la crise actuelle, et nous espérons que nous n’aurons pas l’occasion d’y faire appel cette fois-ci, mais au moins le système est prêt en cas de nouvelle catastrophe dans années à venir…

Si ce même système veut bien donner aux infirmiers la place qu’ils méritent dans les discussions et leur permettre des conditions de travail décentes, ces AR s’avéreront inutiles : c’est ce que nous espérons, pour les professionnels et pour les patients ! Nous espérons que toutes les personnes qui nous applaudissent à 20h réclameront ce changement de conditions de travail dès la sortie de la crise, et que les décideurs politiques y travailleront activement !